Je retiens TOUT de Morrowind. C'est mon jeu fétiche, le petit bijou, le péché mignon. Y a des aspects du gameplay qui ont mal vieilli, comme pour tous les jeux vidéo, mais la profondeur et la précision de tous les éléments du jeu sont telles que je ne me remettrai sans doute jamais de cette expérience.
La musique déjà. Le thème principal bien sûr, qui ne se présente plus et qui est devenu l'identité sonore des TES, qui procure un sentiment de paix seulement retrouvé avec les musiques d'exploration d'Oblivion et Skyrim et quelques morceaux touchants de DAO et Divinity 2. Comme vous tous, le bruit des échassiers des marais m'a marqué, tout comme l'existence même de ces bestioles, ce qui nous amène au point suivant.
Le lore, le scénario... l'univers, bon sang ! TOUT est passionnant : le bestiaire, les factions, les tribus, la religion, la géopolitique, les sociétés, les complots, les secrets et les mystères. La Sixième Maison, le Tribunal, les Cendrais, l'Empire et sa vision, autant de coups de génie qui prouvent combien MK peut être exceptionnel ET compréhensible par le commun des mortels. Chaque petit pas dans l'univers de Morrowind semble emmener un cran plus loin, un chemin qui part vers un horizon nouveau, loin des poncifs et clichés classiques joyeusement repris par tous les autres jeux de la saga et d'innombrables autres RPGs peu inspirés. Ça me fait tellement penser à Dune par moments que je pense que Kirkbride a toujours été un grand fan de Herbert. Y a un tel sentiment de dépaysement, cette sensation d'être ailleurs, c'est du plaisir pur.
Rien que la fin, avec Dagoth-Ur qui fait clairement comprendre au Nérévarine que sa présence ici relève de tout sauf du hasard, et qu'il a été instrumentalisé par tout le monde (les Grandes Maisons, Azura, les Divins, Lorkhan lui-même, les Cendrais, l'Empereur, Vivec, etc) pour se retrouver face à lui, que la destinée du Nérévarine autoproclamé l'amène à affronter celui qui cherche justement à briser le fil du destin et à libérer son peuple des griffes de leurs anciens maîtres, avec la conclusion finale qui permet de voir qu'en dépit de tout la fin de Dagoth-Ur demeure un soulagement pour le peuple de Morrowind... rien que cette fin, c'est la consécration du caractère ambigu et riche de l'univers de Morrowind, aux antipodes de ce qui peut être vécu ailleurs.
Aussi, comme Daichi, la progression. Le sentiment de devenir plus fort, de s'attaquer à des ennemis de plus en plus forts et de moins en moins vulnérables, de se mêler de choses qui ne nous regardent pas et dont même les dieux craignent l'issue. Passer de troufion en règle à seigneur de guerre, partir d'un stade où il est difficile de quitter un village de miséreux sans se sentir en danger dans la nature sauvage et cruelle d'un pays qui nous est étranger pour arriver à un niveau où l'on peut se targuer d'avoir tué un immortel dont la vision dépassait les sphères connues et sauvé un monde en perdition peuplé d'innocents ignorants de ces complots tissés dans l'ombre.
Et pour le gameplay... oui, je prendrai le risque de dire que je l'apprécie toujours autant. Il a ses défauts, comme celui de Skyrim a les siens (je suis personnellement moins excité par le porte-monstre-trésor générique que par le mystère des donjons de Morrowind qui ont le mérite d'être tous différents), mais ces problèmes ne sont que peu de chose face au plaisir que constitue l'utilisation de tous ces sortilèges complexes, de toutes ces armes et toutes ces armures, avec d'innombrables quêtes allant de la livraison à l'assaut total sur un repaire de la Sixième Maison.
Morrowind est juste beau et généreux. C'est un jeu qui est d'une richesse sans limites, inspirante et bienvenue dans un monde où appauvrir l'expérience de jeu pour pousser le joueur à passer à la caisse afin de limiter sa frustration demeure le principal moteur économique de l'industrie vidéoludique. Morrowind reste mon jeu préféré. Quoique l'Oncle Ernest était franchement génial.